vendredi 29 juillet 2011

L'eau de Montpellier au XVIIIe siècle

VISITE GUIDÉE
Journées de Pays et des Moulins 2011

Thème national : Le patrimoine caché
Dimanche 19 juin 2011

Par Caroline Millot
Docteur en histoire de l'art

Faire partager les beautés de certains textes d'archives inédits me paraît essentiel. C'est pourquoi, je propose quelques explications articulées autour de cette « eau de Montpellier ». La Journée du Patrimoine de pays et des Moulins sera cette année encore une journée de dépaysement et de découverte à la rencontre d'un autre patrimoine, plus confidentiel, mais pas moins riche. Le thème de cette 14e édition est le patrimoine caché. Les secrets de fabrication et les savoir-faire, la face cachée de l'art de bâtir, les éléments dissimulés, les détails insolites, l'envers du décor, le patrimoine souterrain (caves, cryptes, troglodytes…), archéologique (fouilles, ruines, vestiges…), l'intérieurs de maisons et de leurs cours, les réserves de musées, les lieux et les mémoires oubliées furent dévoilés le temps d'un week-end. 


Cette Journée est coordonnée nationalement et grâce à l'action de délégations locales de Patrimoine-Environnement, Maisons Paysannes de France, Fédération Française des Associations de sauvegarde des Moulins, CAPEB et les Architectes du patrimoine. Cette manifestation portant sur le patrimoine de l'eau, dont le sujet est d'actualité, est organisée dans le cadre de la manifestation nationale les Journées de Patrimoine de Pays et des Moulins.

L'eau à Montpellier au XVIIIe siècle
Les initiatives des Etats du Languedoc et de la ville associés en font le point d'aboutissement des grands travaux d'eau captée fort loin pour l'époque, à la source Saint-Clément, et qu'un aqueduc construit par Henri Pitot et imité du Pont du Gard fait affluer jusque là. Dans un de ses mémoire militaire destiné au marquis de Paulmy, l'ingénieur Jacques-Philippe Mareschal, en 1752, a recensé environ six puits à Montpellier. On soulignera que pour le siècle qui nous intéresse, le climat, la démographie et le paysage importaient aux yeux des ingénieurs et architectes du roi. Comme le cas de Mareschal en atteste, les forces militaires portaient toute leur attention sur la gestion de l'eau en tenant compte des contraintes. En 1984, un catalogue de l'exposition des Archives municipales de Montpellier, consacrée à Montpellier et ses fontaines (XVIII-XIXe siècles), a montré les enjeux de l'élément employé tant pour l'alimentation que pour les plaisirs des jeux.
Le choix du thème de l'eau pour l'histoire de l'urbanisme montpellierain au XVIIIe siècle est d'importance. Le belvédère de la promenade du Peyrou à Montpellier construit par Jean-Antoine Giral, l'aqueduc Saint-Clément d'Henri Pitot, tous ces ouvrages d'art ont été construits au cours du même siècle. L'alimentation en eau de la capitale provinciale était un point décisif. Les associations des termes de "patrimoine" et "eau" ne sont qu'à leur prémices sur une échelle de temps. La géographe Alix Audurier-Cros, en qualité de responsable du laboratoire de recherche d'Artpos de l'école d'architecture de Montpellier, par des études sur le patrimoine hydraulique des jardins a ouvert nombreux champs de réflexion sur l'essence, l'emploi, et les pratiques autour du patrimoine de l'eau. Bien évidemment, le climat méditerranéen, favorable à une attention toute particulière, révèle l'importance du caracrtère de la gestion de l'eau ou devrais-je dire des eaux. Par exemple, le thème de l'eau avait été retenu en 2007 pour la manifestation Rendez-vous au jardin. Plus techniquement, le 13e Congrès mondial de l'eau s'est tenu à Montpellier, au Corum, du 1 au 4 septembre 2008. 

Les vertus guérisseuses des eaux 
La faculté de guérison donnée à certaines eaux est bien connue. Ainsi que l'indique l'historienne Brigitte Caulier, on ne compte plus les pratiques préventives où l'eau rentre dans le rituel selon diverses modalités. Dans le Vivarais, il fallait boire de l'eau bénite la veille de Pâques et en Nivenais d'autres rituels s'y faisaient. Brigitte Caulier signale qu'en Languedoc-Roussillon, les lieux de cultes bien que peu nombreux, se partagent essentiellement entre les affections des yeux et les maladies de la peau.

L'Eau de Montpellier
D'après le Dictionnaire des symboles de Jean Chevalier, professeur de philosophie, « l'eau  peut guérir en raison de ses vertus spécifiques ». Les significations symboliques de l'eau, en général, peuvent se réduire à trois thèmes dominants : source de vie, moyen de purification, centre de régénérescence. Ces trois thèmes, selon le dictionnaire précité se rencontrent dans les traditions les plus anciennes et ils forment les combinaisons imaginaires les plus variées, en même temps que les plus cohérentes. Nous tenterons au travers de cette définition de saisir les limites de cette « eau de Montpellier ». Si les cultes sont concentrés autour des sources ou résurgences, on constate qu'à Montpellier, c'est plutôt autour des puits et des fontaines que l'attention est portéeLe lieu où se déroula notre visite guidée était à Montpellier, à l'angle de la rue du Puits des Esquilles et de la Vieille intendance. Ce lieu n'est pas fortuit. Les bienfaits de cette eau de Montpellier était attestée par douze médecins de Montpellier dont quelques noms seront cités lors de l'animation. Il ne semble pas que l'utilisation de cette eau de Montpelllier se réfère à des emplois religieux ou à des dates précises. 
Ancienne inscription notifiant la rue du Puits des Esquilles,
Montpellier,  cliché Caroline Millot, 2011.
Selon le Mercure de France de février 1770, le sieur Jean Saury avait obtenu le privilège de vendre cette eau. Il assurait qu' « elle réussissait particulièrement pour les maladies vénériennes ou encore les rhumatismes. Une analyse de l'eau, faîte par M. Cadet en avait démontré sa salubrité. Chez Demoiselle Canclaude, rue de la Vieille intendance et vis à vis le puits des Esquilles, il était possible de la trouver, cachetée et étiquetée  Eau de Montpellier ».


Au travers de l'oeuvre de Mareschal et d'extraits de journaux, comme le « Mercure de France » de 1770, l'association Mareschal retraça  la mémoire d'un lieu et d'une ressource. A la jonction de la Rue du Puits des Esquilles et de la Rue de la Vieille intendance, cette eau était donc vendue dans des fioles. Le titre de cette visite « L'eau de Montpellier au XVIIIe siècle » rappelle donc les vertus supposées de cette eau dont les enjeux sont multiformes. Nous soulignons l''importance de la médecine à Montpellier au Siècle des Lumières. Les bouteilles, contenant une pinte, étaient vendues au prix d'une livre et dix sols. La réputation de cette eau était telle qu'on pouvait également la trouver dans une boutique à Paris située sur le Boulevard de la Chaussée d'Antin.
"L'eau de Montpellier au XVIIIe s."
Caroline Millot, cliché Art'hur Jez, juin 2011.
"L'eau de Montpellier au XVIIIe s."
Caroline Millot, cliché Art'hur Jez, juin 2011.

"L'eau de Montpellier au XVIIIe s."
Caroline Millot, cliché Art'hur Jez, juin 2011.
"L'eau de Montpellier au XVIIIe s."
Caroline Millot, cliché Art'hur Jez, juin 2011.
"L'eau de Montpellier au XVIIIe s."
Caroline Millot, cliché Art'hur Jez, juin 2011.
"L'eau de Montpellier au XVIIIe s."
Caroline Millot, cliché Art'hur Jez, juin 2011.






































Des extraits de journaux livrent toute l'émulation qu'il y avait autour de cette eau. Pour une ville aussi ensoleillée que Montpellier, la maîtrise de l'eau et sa distribution dans la ville et les jardins étaient importantes. Il est à noter que des objets qui se réfèrent directement à cette eau sont conservés au Musée de la Pharmacie de Montpellier Albert Ciurana (Faculté de pharmacie de Montpellier). Les plans et les textes sélectionnés pour cette journée culturelle proviennent de la Bibliothèque nationale de France & des Archives départementales de l'Hérault. 

Le meilleur accueil a été réservé à cette découverte extraite des recherches menées lors de la réalisation de la thèse sur l'ingénieur Jacques-Philippe Mareschal. L'association Mareschal crée un évènement culturel qui aura sans aucun doute des répercussions. Suite à cette manifestation, un article a été commandé nous a été commandé par la direction du Musée de la Pharmacie Albert Ciurana. Article en cours de rédaction : à paraître prochainement dans la parution annuelle du Musée de la Pharmacie de Montpellier.


Naissance et développement de la faïence à Montpellier du Moyen Âge à l’époque moderne
La conférence donnée le 31 mai 2011 par Jean-Louis Vayssettes "Naissance et développement de la faïence à Montpellier du Moyen Âge à l’époque moderne" dans l'amphithéâtre de la Faculté de Pharmacie fut très enrichissante. Nous proposons quelques renvois bibliographiques de l'auteur au sujet de la faïence et de la céramique :
- VAYSSETTES (J.-L.). - L'industrie céramique dans la région de Montpellier : sources écrites, sources archéologiques : recherches des ateliers.- Mémoire de maîtrise d'Histoire de l'Art et d'Archéologie.- Aix-en-Provence, 1981 (dactylographié).
- AMOURIC (H.), BERNARDI (Philippe), VAYSSETTES (J.-L.). - Production et usages des céramiques architecturales en Provence et Languedoc du Moyen Âge à l'époque moderne. In : actes du VIe Congrès de l'AIECM2 (Aix-en-Provence, 13-18 novembre 1995), Aix-en-Provence : Narration éditions, 1997, p. 707-712.
-  AMOURIC (H.), VALLAURI (L.), VAYSSETTES (J.-L.). - Vanités de faïence : entre Provence et Languedoc, carreaux de céramique espagnols, XVe-XVIIIe siècle. Catalogue de l’exposition du Museon Arlaten. Arles : Museon Arlaten, 2000.
- VAYSSETTES (J.-L.). — La collection de céramiques montpelliéraines de l’apothicairerie de la Miséricorde. In : Regards sur le patrimoine hospitalier : apothicaireries, chapelles et mobilier. Arles, Actes sud, 2003, p. 182 à 191.

"L'eau de Montpellier au XVIIIe s." Présentation d'une faience de Montpellier, atelier
Artus-Siffre,  photographie association Mareschal, cliché Art'hur Jez, juin 2011.


"L'eau de Montpellier au XVIIIe s.", Vase produit dans l'atelier 
Artus-Siffre, photographie association Mareschal, cliché Art'hur Jez, juin 2011.
REMERCIEMENTS
L’évènement que nous avons organisé n'aurait pas été possible sans le concours de musées, des collectivités territoriales ou artisans. En accueillant très favorablement cette modeste manifestation, le Conseil Général de l'Hérault a soutenu l'association Mareschal pour l'organisation cette journée de rencontre autour du thème de l'eau de Montpellier et nous le remercions encore pour son investissement. Plus particulièrement, je remercie le conseiller général Monsieur Philippe Saurel, d'avoir soutenu et promu cet aspect commercial méconnu de l'eau de Montpellier (http://www.philippe-saurel.com/actualite/interventions/l-eau-de-montpellier-au-xviii-eme.html).


Sans  empiéter sur le Festival des Architectures Vives qui se déroulait le même week-end, cette journée nous a fait rapprocher les techniques et fait vivre des architectures. Elle n'aurait pu être si haute en couleur sans la participation de François Siffre, qui pour l'occasion nous a prêté un exemplaire d'une cruche en faïence de Montpellier qui était alors en exposition au Musée de la Pharmacie, le temps de l'exposition « les pots d'apothicaires ». Je lui rends hommage pour sa collaboration et sa sensibilité au patrimoine, qu'il soit architectural ou mobilier ... Comme l'indiquait très justement l'article du Midi-Libre du samedi 26 mars 2011 François Siffre redonne vie aux pots d'apothicaires. Pour plus de renseignement ou visiter l'atelier Artus-Siffre à Sainte-Croix de Quintillargues : http://www.atelier-artus-siffre.fr/

Nous remercions chaleureusement le Musée de la Pharmacie, et plus particulièrement Madame Marie-Sophie Guibert et Sophie Mary qui soutiennent notre action et dont nous nous souvenons de l'acceuil favorable du projet. C'est bien l'heureux hasard du calendrier qui a fait que notre animation sur l'eau de Montpellier et l'exposition des Pots d'apothicaires se produisent aux même dates.
Musée de la Pharmacie Albert Ciurana 
15 avenue Charles-Flahault 
34000 Montpellier
04 67 54 80 62
Ouverture le mardi et vendredi de 10h à 12h


Mes plus sincères remerciements s'adressent à Monsieur François Michaud, responsable du pôle Patrimoine du de l'Université Montpellier 1, pour ses conseils avisés. Je réserve une reconnaissance toute particulière à Mademoiselle Ninon Boulanger, étudiante à l'ENIHP d'Angers, pour son encouragement et sa collaboration précieuse tout au long de la mise en place du projet et de la rédaction de la brochure. Elle participa activement à la mise en place de l'animation, à l'accrochage des reproductions et à l’accueil du public. Par ailleurs, je tiens à remercier Monsieur Joseph-Mark Allison, étudiant en communication pour ses conseils. Aussi, je suis reconnaissante au jeune photographe Art'hur Jez pour les clichés qu'il a pris lors de la manifestation du  dimanche 19 juin 2011.



Pour télécharger la brochure « l'eau de Montpellier au XVIIIe siècle » publiée par l'association Mareschal :

L'évènement culturel fut annoncé dans :
Lien Journées du Patrimoine de Pays et des Moulins
www.journeedupatrimoinedepays.com

"L'eau de Montpellier au XVIIIe s."
Caroline Millot, cliché Art'hur Jez, juin 2011.



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